Accueil mise à jour le 9 septembre, 2005 Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. survol du site Page précédente
 

Quel carnet pour quel pèlerin ?

Credencial, creanciale, carnet de pèlerin ... de quoi le pèlerin doit-il se munir ? A quoi ce document va-t-il servir ? Son origine remonte aux lettres de créance, les passeports de jadis, mais son utilisation moderne pour justifier de la qualité de pèlerin auprès du bureau des pèlerinages de Compostelle n'est pas datée avec précision. En 1982, une simple feuille volante, couverte des tampons du parcours, suffisait pour être recu par le chanoine responsable de ce bureau qui ne délivrait que 182 Compostela dans l'année. Aujourd'hui le ton monte parfois quand des touristes fraîchement débarqués de leur car, sans carnet ni tampons, s'offusquent de ne pas obtenir ce fameux certificat. Heureusement une attestation leur est délivrée qui satisfera leur besoin d'un souvenir tangible de leur visite inoubliable au tombeau de l'apôtre.

 

L'origine du carnet de pèlerin est mal connue. Elle remonte sans doute aux sauf-conduits et lettres de créances de jadis et s'apparente aux passeports qui justifient de la nationalité de leur porteur. Il a pu s'agir dans certains cas d'obtenir un droit exceptionnel d'entrer en Espagne. Ces exceptions faites pour les pèlerins ont pu être nécessaires quand les frontières étaient fermées pour cause de guerre, comme par exemple pour le pèlerinage organisé par Charles Pichon en 1938. Aujourd'hui il ne s'agit plus d'autorisation spéciale pour passer la frontière mais de se faire reconnaître comme pèlerin tant pour bénéficier de certains droits spécifiques de logement ou de restauration que pour obtenir le certificat de pèlerinage. Il semble que la pratique d'authentifier systématiquement les pèlerins a été instituée par la Société des Amis de Saint-Jacques qui, dès sa création en 1950, fournissait à ses membres un simple papier (français et espagnol) recommandant le pèlerin aux autorités civiles et religieuses. Ci-contre le modèle encore utilisé en 1982. Il en existe aujourd'hui de nombreux modèles qui se sont notablement compliqués.
Un chercheur ancien pèlerin nous a permis de découvrir un passeport de pèlerin d'août 1829


une page de tampons de l'année 1982

Quel que soit le modèle, nous utiliserons le terme général de carnet de pèlerin. Ce carnet (en espagnol credencial) sert à justifier de votre qualité de pèlerin. Muni de tampons à chaque étape, le carnet sera une preuve de votre itinéraire. Mais toute série de tampons prouvant la chronologie de votre marche servira tout aussi bien de preuve. Il vous permettra de recevoir à Compostelle la "Compostela", certificat officiel délivré par le Bureau des pèlerinages de la Cathédrale aux personnes qui le demandent. En effet pour obtenir ce certificat il faut prouver avoir parcouru au moins les 100 derniers kilomètres à pied de façon continue (ou 200 à bicyclette) et déclarer avoir fait le pèlerinage dans un esprit de piété (pietatis causa). Un autre document est remis à titre de souvenir aux personnes qui ne souhaitent pas faire cette déclaration ou n'ont pas effectué ce dernier parcours (comme par exemple ce pèlerin suisse parti de Berne à pied mais contraint par un accident de s'arrêter à 120 km de Compostelle et de terminer en autobus). Cette pratique manifeste le peu de cas que font les chanoines de Compostelle du "grand pèlerinage" des pèlerins qui viennent de loin, oubliant la tolérance médiévale qui admettait qu'un pèlerin épuisé puisse s'arêter à l'église Saint-Jacques de Villafranca del Bierzo sans perdre le bénéfice de son pèlerinage.

Certains gîtes en Espagne ne sont ouverts qu'aux pèlerins munis de leur carnet de pèlerin qui trouve là sa véritable justification, mais ce n'est pas systématique et ce carnet n'ouvre aucun droit.


En France les gîtes ayant un accueil spécifique pour les pèlerins et demandant le carnet sont rares mais, néanmoins le carnet est de plus en plus fréquemment demandé. Il est nécessaire pour être reçu par les chaînes de familles d'accueil mises en place dans certaines régions et par certains hôtes privés qui souhaitent une certaine assurance sur les personnes qu'ils reçoivent.

 

Il existe un grand nombre de modèles de carnets de pèlerin, le plus répandu est celui édité par la cathédrale de Santiago mais chaque association de pèlerin a fait le sien pour marquer son originalité. En 2001 un modèle commun a été adopté par une vingtaine d'associations françaises. Le Bureau des pèlerinages de la cathédrale envisageait de proposer un modèle unique à partir de l'année sainte 2004. Ce qui aurait été bien s'il avait pu être vraiment international. Son adoption aurait été un beau témoignage d'une volonté d'unité. Nous pouvons encore en rêver. En 1998, l 'Eglise catholique de France a créé son propre carnet sous le nom de créanciale. Voici ce qu'en dit le site officiel de l'Episcopat :

Le pèlerinage vers le tombeau de l'apôtre St Jacques attire beaucoup de monde. Occasion de vivre une démarche personnelle, une recherche et des rencontres. Certains le vivent dans un esprit évangélique : laissant place à la prière, en lisant l'Evangile, vers un lieu de mémoire chrétien, à la recherche du visage du Christ, et dans un esprit de conversion répondant à l'appel du Seigneur. Ceux-là demandent à leur Eglise d'accompagner leur démarche. Une créanciale leur est alors remise, signe du soutien de la communauté chrétienne à leur démarche. C'est dans leur paroisse, ou auprès du service diocésain des pèlerinages, ou de la pastorale du tourisme, que la créanciale peut être obtenue.
D'autres, qui ne souhaitent pas se situer d'emblée dans une attitude de foi chrétienne, font aussi ce chemin pour de multiples raisons personnelles. Des associations jacquaires, non confessionnelles, les rassemblent s'ils le souhaitent. Ces associations délivrent des carnets du pèlerin qui accompagnent la route des marcheurs. Les uns et les autres marchent sur la même route, se respectant les uns les autres, se soutenant entre eux. Ils se réunissent, s'ils le souhaitent, au sein d'associations jacquaires. *

relevé le 20 juin 2003 sur le site officiel de l’Eglise de France
www.cef.fr

Nous sommes très sensibles à une démarche de dévotion et de conversion, conscients de l'intérêt de la marche au long cours pour en développer des conditions favorables. (Ce qui nous fait d'autant plus regretter le manque d'intérêt de l'Eglise de Compostelle pour cet aspect du pèlerinage). Mais nous sommes inquiets à la lecture de ce texte. Trop de personnes ont aujourd'hui tendance à distinguer entre "vrais" et "faux" pèlerins, chacun ayant ses critères : il y a le vrai pèlerin qui "marche sur les sentiers" tout en faisant transporter son sac et les fausses pèlerines qui portent leurs sacs, mais, elles, "marchent sur les routes" ... comme nous avons pu l'entendre.
Alors si l'Eglise apporte des arguments aux purs qui souhaitent se démarquer "des autres", nous disons ATTENTION ! N'avons-nous pas entendu une personne autorisée, commentant les efforts faits pour proposer des accueils chrétiens sur la voire du Puy nous dire "les autres on vous les laisse" ? Ne séparons pas trop vite le bon grain de l'ivraie. Nous estimons qu'il est possible de pèleriner, vers Compostelle ou d'autres sanctuaires, dans une attitude de foi chrétienne, sans créanciale ni carnet d'aucune sorte et nous ne cherchons pas à "sonder les reins et les coeurs" de ceux qui honnêtement prennent le chemin ... ou la route. N'importe quel pèlerin peut aller faire tamponner n'importe quel carnet à son curé, il peut aussi lui demander sa bénédiction sans tampon de la paroisse !


 

En 1982 chaque halte "du chemin" ne se souciait pas d'avoir un tampon original !

Le carnet de pèlerin peut être obtenu à Saint-Jean-Pied-de-Port pour ceux qui y passent. Il est, le plus souvent, délivré par des associations*, qui le considèrent comme une recommandation donnée à la personne qui le reçoit. En échange de cette recommandation, les associations proposent au demandeur d'adhérer à l'association et d'appporter ainsi sa contribution à la vie du mouvement jacquaire. Cette adhésion n'est pas obligatoire.

L'Eglise et certaines associations attachent une grande importance aux conditions de délivrance du carnet. Elle est une occasion de rencontre et d'échange entre ancien et futur pèlerin (c'est le dénaturer que le délivrer comme un document administratif). Cependant demander le carnet de pèlerin n'implique pas d'engagement sur les motivations pour prendre le chemin. Cela engage à cheminer dans le respect et la tolérance vis-à-vis des autres pèlerins et dans un esprit d'ouverture aux motivations de chacun.


Dans leur majorité, les carnets rappellent qu'au bout du chemin se trouve un haut lieu spirituel où un apôtre du Christ est vénéré depuis plus de dix siècles. Chaque démarche individuelle d'aujourd'hui s'inscrit ainsi dans une histoire qui la dépasse. C'est l'appel du chemin que résume bien ce cri traditionnel des pèlerins :


Ultreia ! Allons plus loin l'origine d'Ultreia

* A propos des associations.
Il existe plus de 50 associations jacquaires en France. Chaque association a ses propres caractéristiques. Les plus nombreuses sont de véritables associations de bénévoles, au service des pèlerins. D'autres assurent la promotion des ambitions politiques ou commerciales d'un élu ou d'un responsable local. Le nom d'association, autorisé par la loi de 1901, cache aussi des structures dominées en fait par des organes politiques (Conseils régionaux, généraux ... ) ou économiques (petites activités commerciales sous couvert associatif). Certaines sont plus marquées idéologiqement. Soyez donc méfiants ! Au futur pèlerin de faire son choix en fonction de ses critères personnels, de ses affinités idéologiques, des facilités géographiques et de ces centres d'intérêt. Votre discernement et votre libre arbitre vous guideront aussi parmi les innombrables conseils que vous ne manquerez pas de recevoir.

Faites votre chemin !

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