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Jean Chaize, juin 2003
Jean Chaize, l’un des premiers artisans à l'origine du
«Saint-Jacques», nous permet de publier l'article ci-dessous qui reprend une
communication qu'il a faite à la Société Académique du Puy. Cet article fondamental
raconte comment est né le GR 65.
Compte tenu de l’importance acquise en Haute-Loire par
le Chemin de Saint-Jacques et des retombées procurées, il semble opportun
de consigner aujourd'hui, succinctement, l'histoire du réaménagement de
l'ancienne voie pèlerine, connue et présentée sous le sigle G.R. 65. Une
histoire récente me direz-vous, par rapport aux sujets habituellement
traités à la Société Académique, mais qui dans l'avenir risque de présenter
un certain intérêt auprès de nos compatriotes. Les apports de l’histoireEn tout premier lieu, un inventaire des traces laissées par
ces lointains pèlerins intervint. Ce rapide recensement des écrits connus
fit apparaître d'énormes vides et beaucoup d'imprécisions. En outre, les
nombreuses voies possibles s’avérèrent d'autant plus incertaines qu'elles
pouvaient éventuellement se confondre avec celles du propre pèlerinage
à Notre-Dame du Puy. Si la littérature consacrée à la grande aventure
des jacquaires révélait l'immense besoin qu'eurent des milliers d'êtres
humains d’entreprendre ce voyage, elle ne sut fournir les indications
attendues. Ainsi, le Guide du Pèlerin pièce clé, car la plus ancienne.
se révéla bien évasif et discret quant au tracé de la via Podiensis. Par
contre, dans son ouvrage Les pèlerins du Moyen-Age , Raymond Oursel signalera
quelques tronçons de voies jugées fréquentées par nombre de sujets en
route pour la Galice. Soigneusement notés, ces échos, joints à ceux de
lieux où transparaissait le nom ou le souvenir de saint Jacques permirent,
lors des réunions tenues chez la secrétaire des Sentiers de G.R. , de
modeler l'esquisse du futur et moderne itinéraire La recherche d’un tracéC'est autour de cette structure que va pouvoir se bâtir
la voie nouvelle. Mais, de nos jours, les liaisons entre ces divers points
n'apparurent pas systématiquement évidentes. L'exploration sur le terrain
s'imposera donc et durera pres de 18 mois. Pour cela et après maintes
discussions il fut décidé que l'on devrait prendre en compte et respecter
les notions suivantes : Le balisageAprès la période purement prospective, laborieuse à souhait et une fois bien déterminé le tracé sur la carte, vint alors celle du balisage proprement dit, dont les outils nécessaires : brosses, planes, peinture furent fournis par le Federation des Sentiers. Cette dernière phase vit le groupe revenir sur le terrain. Mais les précédentes allées et venues de 10 à 20 personnes, les nombreux et cordiaux contacts échangés avec la population ne furent pas perdus, les autochtones en les retrouvant ne manquant pas d'aborder les baliseurs en ces termes amicaux : «voilà les Saint-Jacques qui reviennent». L'empreinte du pèlerinage devenait donc réelle, effective sur l'ensemble du nouvel itinéraire et les néo-pèlerins pourraient venir sans risque d'être rejetés ou regardés de travers. Les gîtesMais l'aventure ne sera pas terminée pour autant car deux éléments très importants faisaient encore défaut. L'un demeurant celui des gîtes capables d'héberger les marcheurs en fin de journée. Après étude, trois sites s'imposaient entre Le Puy et l'entrée en Lozère, mais leur aménagement dépassait les compétences et les possibilités du petit groupe de bénévoles. Il fallut se résoudre à convaincre certains responsables locaux de s'impliquer et s'intéresser à ce besoin propre au randonneur, qui, le soir venu, après une journée de marche, aspire è trouver un toit, un abri pour passer la nuit et récupérer de la fatigue. Saint-Privat d'Allier fournit un premier lieu idéal pour ces pauses nocturnes. Le Maire, alors Conseiller Général, qui s'était amicalement gaussé précédemment de l'équipe et de son ambition, affirmant qu'il était utopique d'espérer voir des marcheurs se lancer à l'aventure le long de ces chemins isolés, perdus dans la nature, accepta néanmoins de réserver un lieu d'accueil dans un immeuble communal, théoriquement vide au cours de I'été, car aménagé pour héberger durant la mauvaise saison des personnes seules, trop isolées du bourg pour demeurer chez elles. Puis, à I'autre bout du département, au domaine du Sauvage, grâce à I' amabilité du gardien et compte tenu des nombreux bâtiments disponibles, il fut convenu que l'un d'eux pourrait, sans trop de problème, recevoir les marcheurs avant qu'ils ne franchissent la Margeride au profil bien désertique . En position intermédiaire, Saugues, malgré tous ses commerces posera un problème car ne parvenant pas à dégager d’emblée un lieu de repos adéquat. Heureusement le hasard y suppléa. Ayant entendu que, sur le plan national, cent toiles de tente susceptibles d'accueillir 15 a 20 personnes étaient gracieusement fournies pour répondre aux besoins d'organismes d'accueil passager, le groupe put, grâce à la célérité du Maire et Conseiller Général de Saugues, obtenir liVraison de la dernière tente disponible. Parvenue à Langeac, transportée a Saugues, installée durant l'été, elle servira quelques années avant que d'autres types d'équipement plus adéquats ne soient créés. Le premier topo-guideSi le G.R. 65, Sentier de Saint Jacques semblait alors opérationnel,
en Haute-Loire tout au moins, il manquait encore un élément complémentaire
bien indispensable pourtant, à savoir un topo-guide décrivant I'itinéraire
au fil du parcours. Rapidement et soigneusement élaboré, incluant pour
la première fois dans un descriptif divers éléments, particularités, curiosités,
légendes, échos d'histoire locale, etc. Terminé, ce document fut imprime
gracieusement par la Chambre de Commerce du Puy, dûment complété par des
cartes appropriées. Ainsi, fin 1972, la boucle se bouclait, les pèlerins
ou randonneurs pouvaient entreprendre leur périple, d'autant plus que
la Lozère et l'Aveyron, rapidement opérationnels permirent à la Fédération
Nationale d'éditer, sur les bases de notre mouture, un topo-guide officiel
couvrant le parcours du Puy à Conques. Si on connaît la suite de cette
initiative à travers son succès actuel, drainant annuellement sur le Puy
près de 10 000 personnes et d'autre part ayant abouti en 1998, lors de
l'inscription des Chemins de Saint Jacques au Patrimoine mondial, au
classement particulier de la cathédrale et de l'hôtel-Dieu du Puy. |
Ce témoignage de pionnier est extrêmement précieux en ce qu’il nous replace à la naissance de ce chemin. Il nous a suggéré les commentaires suivants. La documentation était mince, réduite au Guide
du pèlerin. A défaut d’écrits mentionnant Compostelle
dont on cherchait le chemin, restaient des toponymes, des sculptures ou
des vestiges, comme des coquilles, qu’il fut tentant de considérer
comme des balises indiquant la route de Galice.
Les visiteurs qui ne l'ont pas lu trouveront ci-dessous
deux pages extraites du livre de Raymond Oursel. En 1963, il n’avait
pas entrevu la vocation politique du dernier Livre du Codex Calixtinus,
devenu le Guide du pèlerin,
mais il porte un regard lucide sur la manière dont sont redessinés
les itinéraires routiers de son époque. LES QUATRE ROUTES FRANÇAISES : UNE VISION HEROiQUE ET GRANDIOSE.… A plus forte raison, une extrême variété d'itinéraires
était concédée au pèlerin de France, d'Allemagne ou d'Italie jusqu'à
la traversée des Pyrénées. Hors la recension des «corps saints», qui s'accommode
de bien des détours, le laconisme du Guide est total sur ce point, et
son intention apparaît bien moins de définir des axes infrangibles, que
d'étendre sur la surface du royaume franc, par une vision d'une poésie
intense, et comme en raccourci, l'éventail sacré qui la balaiera toute.
Pèlerins du Moyen Age, Paris, Fayard, 1ére éd. 1963,(éd. 1978, pages 168-169) |
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