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un besoin fondamental de changer d'horizonLe pèlerinage est une migration temporaire pratiquée depuis la nuit des temps sous toutes les latitudes et par toutes les religions. De tout temps, des hommes et des femmes, seuls ou en groupe, quittant leur lieu de vie habituel, se sont mis en marche vers des lieux symboliques ou mythiques. Appétit de sacré ? Goût d'absolu ? Quête d'une puissance spirituelle ? Ultime trace de nomadisme ? Souvenir des temps où les groupes se retrouvaient autour de leurs nécropoles ? Sans doute un peu de chacun de ces éléments, auxquels se mêle le besoin fondamental de changer parfois d'horizon. A l'origine, le mot " pèlerin " est l'exact synonyme des mots " étranger " et " voyageur " avant de désigner, vers l'an Mil seulement, le voyageur marchant dans un but religieux vers un sanctuaire lointain, tout en gardant la synonymie première. des formes variables mais toujours une ruptureLe pèlerinage chrétien se rattache à différents types de marche évoqués dans la Bible : Abraham quittant sa maison pour répondre à l'appel de Dieu, les quarante années d'errance dans le désert des Hébreux attendant le retour en Israël, les pérégrinations de Jésus pendant sa vie publique. Conçu comme une errance perpétuelle, ce pèlerinage a été pratiqué à partir du VIIe siècle par certains moines, en particulier des Irlandais qui se considéraient comme des étrangers sur la terre. Derrière eux, des laïcs ont mis leurs pas dans ceux de Jésus et dans ceux de ses compagnons, les apôtres, conscients de ce que la vie est elle-même un pèlerinage, un cheminement sur terre avant de rejoindre l'Au-delà. Au Moyen Age, le pèlerinage est au cœur de la vie. Il mélange
la dévotion, la fête, les rencontres et les activités marchandes. Mais
le mot a évolué au fil des siècles, désignant tout aussi bien le déplacement
vers un lieu lointain impliquant qu'on devienne " l'étranger " que la
marche vers un sanctuaire familier, très proche de son domicile. Mais
toujours, le pèlerinage marque une rupture avec la vie quotidienne. à pied vers CompostelleLe pèlerin de Compostelle, en marchant à pied pendant des
semaines, cherche à retrouver les sensations de ses ancêtres et se créée
tout une imagerie parfois bien stéréotypée : le pèlerinage implique une
dimension de pénitence. Il faut souffrir, quitter son confort, accepter
des conditions de vie frustres, se priver,… Rentré chez lui, il retrouve
d'autres pèlerins véhiculant avec eux, peut-être inconsciemment, une sorte
de rite initiatique : mettre ses pas dans les pas des prédécesseurs, souffrir…
une sorte de " bizutage " imposé par les anciens ou la tradition. Alors, que faire aujourd'hui ?Quittant les images, les conseils, les guides de toute nature, le pèlerin d'aujourd'hui marche en droite ligne, à l'affût des rencontres des autres, de tous ceux que sa condition d'étranger effraie (ou indiffère). C'est lui qui, humblement, doit aller vers ces autres, demander sa route, demander une adresse. Chemin faisant, il s'imprégnera des conditions de vie de ces régions qu'il traverse progressivement. Au lieu de se cacher dans des chemins où il ne rencontre que ses semblables, ou de se sauver en prenant le bus, il renoncera parfois à son " pèlerinage bucolique " et, sans craindre les banlieues industrielles (quelle belle occasion de voir quelles sont les industries de la région), il s'aventurera sur les routes nationales en s'affligeant de voir les villages qu'il traverse soumis à leur trafic, il découvrira de vrais bistrots-épiceries-quincailleries-vêtements, à l'usage non des pèlerins-touristes mais des autochtones, il dormira dans des chambres d'hôtes tenues par des gens du cru. Là sont les vrais lieux de rencontres. Pas des rencontres entre soi, qu'il faut garder pour le retour, pour le plaisir de se raconter mutuellement son expérience quand on a oublié ses pieds et son sac. Voir aussi les réflexions sur le thème ETRE PELERIN Denise Péricard-Méa |
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