mise à jour le 20 janvier, 2006 | Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. | survol du site | Page précédente | Accueil |
On lit couramment dans nombre de brochures touristiques ou publicitaires que les chemins de Saint-Jacques figurent au patrimoine mondial de l'humanité.
Cela est vrai pour le chemin espagnol ou Camino francès. Ce ne
l'est pas pour les chemins en France et encore moins dans le reste de l'Europe.
Mais, comme souvent en ce qui concerne Compostelle, la réalité
est déformée. Elle a été embellie par la foi des pèlerins et l'enthousiasme
des précurseurs et cela est compréhensible.
Le développement du phénomène
compostellan dans une société très médiatisée
et les ambitions nées du succès
du pèlerinage contribuent aujourd'hui à la déformer encore
plus. Les intérêts et les luttes de pouvoir côtoient les
bons sentiments. Le souci de maintenir des traditions (souvent plus récentes
qu'on ne le pense) et la peur de sortir des discours convenus s'allient à l'incompétence
et à la mauvaise foi pour diffuser des idées fausses et induire
en erreur tous ceux qui s'intéressent
à Compostelle.
En 1984 une recommandation du Conseil de l'EuropeAu cours de sa trente sixième session, le 28 juin 1984, l'ASSEMBLEE PARLEMENTAIRE DU CONSEIL DE L'EUROPE émet une recommandation relative aux itinéraires européens de pèlerinage (RECOMMANDATION 987) 1998, des monuments et des portions du « chemin français de Santiago » élevés par l’UNESCO au rang de Patrimoine de l’HumanitéLe Camino frances espagnol ayant été classé
Patrimoine mondial en 1993, la France n'a pas voulu être en reste. Les démarches
ont été entreprises par le Ministère de la Culture (Direction du Patrimoine)
en 1994 puis en 1996. Ce
ministère
a déposé les dossiers de demandes à l'UNESCO en juin 1997. Pour établir ces
dossiers, le Ministère s'est appuyé sur trois organismes : Ces organismes se sont basé sur les hypothèses des premiers chercheurs qui se soient intéressés à Compostelle qui n'avaient pas toutes été vérifiées. (cf. la diffusion des chansons de geste). Aucun apport historique ou scientifique récent et contradictoire n'a été sollicité. Elles avaient pour origine la description des itinéraires contenue dans le Guide du pèlerin, complétés d'itinéraires secondaires établis en reliant entre eux des sanctuaires et établissements hospitaliers sous le vocable Saint-Jacques ou comportant des indices de passage de pèlerins (de Galice ou d'ailleurs). Les dossiers ainsi établis par des pèlerins, des randonneurs et des politiques sans compétences particulières ont été soumis aux inspecteurs de l’ICOMOS (International Council On Monuments and Sites) Ceux-ci ont fait des enquêtes pour vérifier que les demandes correspondaient bien aux critères fixés par l’UNESCO. Les enquêteurs ont alors jugé que les routes de pèlerinage ont permis « la remontée d’objets orfévrés musulmans… hâtivement christianisés qui se retrouvent dans les trésors des églises de France » en même temps que la descente vers l’Espagne d’objets « autrefois appelés limousins dont on sait aujourd’hui qu’ils ont été produits entre Loire et Douro ». Ils ont admis que « les chemins de Saint-Jacques ont été les vecteurs de la naissance et de la circulation des chansons de gestes aux XIe-XIIe siècles ». Mais ces chemins français étaient
de loin moins pertinents que le chemin espagnol. Sur une longueur totale
de 5000 kilomètres identifiée, sept tronçons discontinus
d'une longueur moyenne de 22,5 km ont été proposés et
finalement retenus. La réalité n'en est pas moins déformée sur le site
de l'ACIR qui n'hésite pas devant deux affirmations contradictoires : Plus honnête,
la Société des
Amis de
Saint-Jacques précisait dans son bulletin du 1er trimestre 1999
que c’est indûment qu’on a annoncé le « classement des chemins de Saint-Jacques
en France », précisant qu’il ne s’agissait que du classement
de tronçons de chemins « choisis en raison de leur préservation en sentiers
piétons ». Une dizaine d'entre eux figuraient déjà au patrimoine Mondial (comme le Mont-Saint-Michel ou Sainte-Madeleine de Vézelay) et n'avaient aucunement besoin d'une reconnaissance supplémentaire. N'ont-ils pas plutôt servi de faire-valoir ? Parmi les biens intéressant l’hospitalité figurent l’hôtel-Dieu du Puy dont aucun texte connu ne mentionne le nom de Compostelle et qui fut créé pour les pèlerins venant vénérer la Vierge Noire, deux hôtels-Dieu Saint-Jacques, à Toulouse et Figeac, le vocable apparaissant comme suffisant pour justifier leur place sur un chemin et, plus surprenant encore, sans doute comme balise … le dolmen de Pech-Laglaire à Gréalou (Lot) … Les enquêteurs donnent finalement les raisons suivantes dans le rapport de la 22 ème session du Comité du Patrimoine mondial réuni à Kyoto : Justification d'inscription : Tout au long du Moyen Âge, Saint-Jacques-de-Compostelle fut la plus importante de toutes les destinations pour d'innombrables pèlerins venant de toute l'Europe. Pour atteindre l'Espagne, les pèlerins devaient traverser la France, et les monuments historiques notables qui constituent la présente inscription sur la Liste du patrimoine mondial étaient des jalons sur les quatre routes qu'ils empruntaient. Une réalité contemporaine incontournable et convoitéeOn cherche en vain une approche scientifique et professionnelle de ce dossier. L'affectif et le politique y ont tenu les premiers rôles. Cela est compréhensible de la part d'organismes de promotion des chemins qui y avaient leur intérêt. Cela l'est moins de la part des inspecteurs dont la capacité critique semble avoir été bien faible. Des hypothèses non vérifiées des premiers chercheurs français, on est passé à la consécration internationale de chemins qui, s'ils n'ont pas eu la réalité historique qu'on leur prête sont devenus une réalité incontournable contemporaine. Qu’importe. On sait même aujourd’hui que le document initial, le Guide du pèlerin au titre trompeur n’a pas été connu en France, ni ailleurs, avant la fin du XIXe siècle. Les études d’Alison Stones[1]l’ont démontré, celles de Bernard Gicquel l’ont largement confirmé[2]. Même s’il n’a pas été l’ancêtre du Guide Bleu, du Guide du Routard ou des topo-guides de la Fédération Française de la Randonnée Pédestre, il prévaut aujourd’hui et est brandi lors des discussions autour de tracés de nouveaux chemins. Car les appétits restent ouverts ... les généralisations hâtives et les à-peu-près permettent toutes les fantaisies. Les espérances de retombées économiques et les intérêts politiques locaux avivent les ambitions. Une nouvelle ère s'est ouverte pour les chemins de Compostelle. Elaborée en France à partir de la traduction de Jeanne Vielliard,
l'hypothèse des quatre chemins de Compostelle lui est revenue sous la forme
d'une affirmation validée par une autorité internationale incontestable.
Le 29 décembre 1998. l'UNESCO adressait au Gouvernement français
une lettre dont voici un extrait : Jacques d'Anvailles
[1] A.
Stones et J. Krochalis, « Qui a
lu le Guide du pèlerin ? » Pèlerinages
et croisades, Actes du 118e colloque de Pau, 1993, Paris, C.T.H.S., 1995,
p.11-36 Sources : |
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