mise à jour le 21 janvier, 2007 | Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. | survol du site | Page précédente | Accueil |
L'image de millions de pèlerins sur les chemins de Compostelle est fréquente. Jusqu'à la fin du XXe siècle elle a été appuyée sur des dénombrements faits en particulier à partir des établissements (hôpitaux ...) censés accueillir des pèlerins, supposés aller tous en Galice. Les recherches de Denise Péricard-Méa n'ont pas permis de retrouver trace de ces foules. Mais elles ont apporté une autre explication. Voir l'origine des millions de pèlerins
Peu de traces de millions de pèlerins médiévauxD’aucuns ont prétendu que les routes médiévales étaient encombrées de cohorte de pieux pèlerins se dirigeant tous d’un même pas vers Saint-Jacques-de-Compostelle, et se sont même sentis capables de différencier «les pèlerins authentiques» des autres, dont «le saint voyage recouvrait une réalité inavouée ou mal défendable». Voici quelques exemples choisis chez divers journalistes : « On estime aujourd’hui qu’à la grande époque, chaque année
cinq cent mille pèlerins, les jacquets, prenaient la route à l’époque
de Pâques pour être rentrés chez eux avant l’hiver» ; Pourtant, dès 1977, un médiéviste normand, Lucien Musset qui se préoccupait de compter les pèlerins de sa région s’étonnait fort de les trouver si peu nombreux dans une période balayant pourtant l’ensemble du Moyen Age. Certes, concluait-il « il y a sûrement d’autres références à trouver, elles ne bouleverseraient sans doute pas l’impression que l’on peut tirer de nos textes, celle d’une tiédeur qui reste assez singulière pour une population prête à s’expatrier sous quelque prétexte que ce soit ». Il rejoignait là, par delà les siècles, les constats implicites de Guibert de Nogent, ce moine qui mettait déjà en doute l’authenticité des reliques tout en reconnaissant leur valeur économique. En 1119-1120, il ignorait totalement saint Jacques alors qu’il s’intéressait à tous les types de reliques et citait bon nombre de grands sanctuaires. Combien furent-ils, à entreprendre ce grand voyage ? Les
confréries de pèlerins livrent çà et là quelques chiffres, qu’il faut
toujours considérer comme supérieurs à la réalité à cause des intentions
de pèlerinage. D’autre part, ces chiffres, très fluctuants par nature
et toujours donnés à un moment où la confrérie se réorganise et rédige
des textes, représentent des pointes maximales dans le nombre des confrères.
Cependant, c’est là que se regroupent tous les anciens pèlerins et qu’on
en trouve le plus grand nombre. « Les catholiques, ayans mis du tout leur espérance en Dieu, en la glorieuse Vierge Marie et aux benoîts saints de Paradis…s'entremirent à faire voyages et pèlerinages aux lieux saints où reposent les reliques et corps des saints de Paradis…Au voyage de monseigneur saint Jacques allèrent, en cette année et la précédente, grande multitude de gens, hommes et femmes, non seulement du royaume de France, mais des autres royaumes et pays étrangers. Il ne se passa semaine durant ce temps qu'on ne vit passer pour aller et venir audit pèlerinage. De la ville de Sens en l'an dernier, y en alla plus de vingt personnes, et de la ville de Provins en cette présente année, bien autant et plus, en trois bandes. La première partit … au mois de janvier, ils étaient le nombre de neuf personnes…au mois d'avril suivant … partit une autre bande … montant à aussi grand nombre que la première. La troisième partit environ la fête monseigneur saint Rémy, montant au nombre de quatre ou cinq». A Cléry-Saint-André en 1592, ils sont 16. « On voit passer et on héberge chaque année à l’hospice de Burgos, où on leur donne à manger gratis deux ou trois jours, huit à dix mille Français et Gascons qui viennent dans nos royaumes à l’occasion du pèlerinage … En France, dit-on, ils promettent pour dot à leurs filles ce qu’ils auront amassé au cours d’un voyage aller et retour à Saint-Jacques, comme si c’était aux Indes, en venant en Espagne avec des pacotilles ». Dans Don Quichotte, Cervantès parle de la même manière de : “ ces pèlerins, qui ont coutume de venir en grand nombre chaque année visiter les sanctuaires de l'Espagne, qu'ils regardent comme leurs Grandes-Indes, tant ils sont surs d'y faire leur profit. Ils la parcourent presque tout entière, et il n'y à pas un village d'où ils ne sortent, comme on dit, repus de boire et de manger, et avec un real pour le moins en argent. Au bout du voyage, ils s'en retournent avec une centaine d'écus de reste, qui, changés en or, et cachés, soit dans le creux de leurs bourdons, soit dans les pièces de leurs pèlerines, soit de toute autre manière, sortent du royaume et passent à leur pays, malgré les gardiens des ports et des passages où ils sont visités ". Du côté français, les réglementations se font sévères aux XVIIe et XVIIIe siècle, à cause des guerres franco-espagnoles et à cause de la misère qui sévit en France dans le peuple, lequel part chercher ailleurs des conditions de vie moins misérables. Puisque les millions de pèlerins ne se comptent pas sur les routes et qu’on en parle continuellement, où sont-ils ? Ils sont dans chaque livre, chaque guide, chaque article. A quoi se réfère l’abbé Daux lorsqu’il parle « des longues théories de toutes nations, cheminant pieusement vers Compostelle » ? A quoi se réfère Jean Secret lorsqu’il « imagine aisément les quelques millions de pèlerins qui ont sillonné les routes de Saint-Jacques » ? Qui a expliqué à Barret et Gurgand que « par milliers, par millions, ils quittaient les cités, les châteaux, les villages et prenaient le chemin de Compostelle » ? On n’en finit pas de les lire et ils s’enracinent profondément dans l’imaginaire du pèlerin d’aujourd’hui. La fatigue aidant, le pauvre pèlerin finit même par les sentir physiquement autour de lui lorsqu’il crapahute dans les prés des vaches de l’Aubrac ! Lequel d’entre nous n’y a pas pensé ? Foules retrouvées : |
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