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mise à jour le 15 janvier, 2009 Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. survol du site Page précédente Accueil
 

La Légende de Compostelle / Le Livre de saint Jacques

La cathédrale de Compostelle conserve un manuscrit dont le nom est très connu, le Codex Calixtinus. Ce manuscrit est souvent confondu avec le dernier Livre qui le constitue, seul traduit en français en 1938. Il est par ailleurs très peu connu. La Fondation David Parou Saint-Jacques, consciente de l'intérêt de mettre le texte de ce manuscrit à la portée de tous ceux qui ne peuvent le lire ni dans l'édition espagnole, ni dans le texte latin a pris l'initiative de faire publier la traduction intégrale en français réalisée par Bernard Gicquel. Cette traduction est précédée d'une importante étude de sa genèse et d'une postface retraçant l'histoire de la légende de Compostelle.

Le double titre de cet ouvrage renvoie à ses deux parties.
La première traite des circonstances dans lesquelles le personnage de l’apôtre saint Jacques, sur lequel les Évangiles ne donnent que des informations très succinctes, a connu un développement légendaire substantiel qui a fait de lui l’évangélisateur de l’Espagne, puis, en quelque sorte par voie de conséquence, lui a attribué un tombeau sur le site de la future ville qui portera son nom. Partant d’informations éparses et toutes apocryphes, les catalogues apostoliques ont proposé à son sujet de brèves notices qui ont répandu, à côté d’informations basiques sur son état civil, de vagues assertions sur sa prédication en Espagne et des termes énigmatiques sur sa sépulture qui ont incité à la découvrir au début du IXe siècle, friand de reliques, sur les côtes de la Galice.

Pour expliquer la présence du tombeau en cet endroit, une légende de translation du corps de saint Jacques, martyrisé à Jérusalem, a été forgée par synthèse de données empruntées d’une part à l’histoire de l’hérétique Priscillien, prédicateur en Galice, martyrisé à Trèves au Ve siècle mais dont le corps a été rapatrié sur les lieux de son ministère, et de la légende des sept évangélisateurs de la Bétique, elle-même une version occidentale de la légende grecque des sept dormants d’Éphèse. Ainsi le personnage de Jacques, qui tient de son nom biblique la qualité de « supplanteur », amalgame-t-il les deux récits qui pourraient lui susciter des concurrents dans le patronat de l’Espagne.
Le développement d’un pèlerinage au tombeau de saint Jacques se reflète successivement dans deux séries de textes qui attribuent à saint Jacques, entre 1110 et 1120, le mérite d’avoir initié la conquête fictive de l’Espagne par Charlemagne, et, entre 1130 et 1135, l’accomplissement de vingt-deux miracles au profit des pèlerins qui se rendent sur son tombeau. Ces deux textes seront réunis après 1141 par Pierre de Poitiers, (venu avec Pierre le Vénérable en Espagne et chargé de traduire le Coran), en un volume intitulé Liber Miraculorum sancti Jacobi papae Calixti , donc attribué au pape Calixte II, qui connaîtra plusieurs versions successives et aboutira à la rédaction du Jacobus de la Cathédrale de Compostelle, distinct de toutes les versions qui l’ont précédé par l’adjonction, en tête du recueil, d’un ensemble très volumineux de sermons et de messes chantées, et, en dernière partie, d’une présentation de l’itinéraire de Saint-Jacques de Compostelle, connue depuis 1938 sous le titre inexact de Guide du Pèlerin de Saint-Jacques. Des indices concordants suggèrent que le luxueux manuscrit aura été rédigé à Vézelay et copié à Cluny, puis apporté à Compostelle en 1164 par l’archevêque de Mayence, Konrad von Wittelsbach.
La traduction intégrale en français, - la première en son genre - du Jacobus, alias Livre de saint Jacques ou Codex Calixtinus forme la deuxième partie du livre.
L'interprétation de ces textes, tous apocryphes, n'y recherche ni des témoignages sur leur époque, la personnalité supposée de leurs rédacteurs ou l'histoire des idées religieuses, mais la présence en eux-mêmes et dans leurs rapports entre eux des multiples courants qui déchirent cette période troublée de la Reconquête. Trois schismes pontificaux entre 1119 et 1160, les tensions entre les Augustins, les Clunisiens et les Cisterciens, l'héritage impérial de Charlemagne que se disputent la France, l'Espagne et l'Empire germanique apparaissent à l'origine de cette production textuelle. Loin de refléter une situation triomphale de Compostelle, elle cherche à conjurer les dangers qui menacent la ville, le tombeau de l'Apôtre et la grande cathédrale qui est son écrin. Ce discours de style roman et clunisien s'interrompt brutalement au seuil de l'âge gothique et cistercien.


La Légende de Compostelle / Le Livre de saint Jacques,

Tallandier 2003, 760 p. par Bernard Gicquel

postface de Denise Péricard-Méa

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