mise à jour le 20 janvier, 2006 | Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. | survol du site | Page précédente | Accueil |
Besançon possède un hôpital Saint-Jacques, et, pour qui sait les trouver dans la cour d’une école, les ruines d'une chapelle primitive à laquelle il a emprunté son vocable. Ces ruines sont le premier témoin du souci d’hospitalité manifesté dans cette ville, premier maillon de la longue chaîne qui a mené jusqu’au CHU d’aujourd’hui. Ne méritent-elles pas d'être sauvées et mises en valeur même si elles n'ont rien à voir avec Compostelle ?
Quand deux religieuses de l’ordre hospitalier de sainte Marthe
arrivent à Besançon en 1667 venant de l’hôtel-Dieu de Beaune, en grand équipage,
dans le carrosse à six chevaux de Mgr l’archevêque Antoine-Pierre de Grammont, l’hôpital Saint-Jacques a déjà
presque cinq siècles d’existence[1] . Un hôpital près d’une chapelle élevée sur des ruines antiquesEn 1182, lorsque le chapitre de l’église collégiale de Sainte-Madeleine
décide de créer un hôpital, le Pape Lucius III donne son accord à « ses
fils aimés, chanoines de Sainte Marie Madeleine de Besançon » pour
« construire une maison hospitalière en vue de l’accueil des
passants, pour que ceux qui vont à Rome ou à Jérusalem y reçoivent les secours
de la charité ». Ils l’ont « adjointe à l’église Saint Jacques
du bourg d’Arènes » [2] | |
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Le lieu choisi est près de la porte de la ville qui mène
à la route de la vallée du Doubs, dans un quartier encore peu peuplé, derrière
la première enceinte de la ville. On y voit des meix,
jardins et vergers, il y aura des vignes et des tanneries sur la rive droite
du Doubs et, proche de l’hôpital, l’un des moulins de la ville. Ce quartier
sera très populaire, et il l’est resté. |
Si Alexandre II se contente d’approuver l’acte de Hugues sans énumérer
les biens conférés à l’église, Calixte II, sans doute parce qu’il connaît
bien Besançon (il a été éduqué à l’école du chapitre de la cathédrale
Saint-Jean) énumère toutes les possessions incluses dans la dotation.
La bulle de Célestin II reprend les mêmes formes. L’ ecclesia
sancti jacobi infra harenas est nommément citée. Elle est située hors
les murs, près d’une porte de la ville comme l’étaient bien souvent
les premiers lieux de culte du Moyen-Age. Aucun texte ne permet de savoir
à quelle date remonte sa création. Des traces de la chapelle disparue | |
Concrètement, il ne reste de cette chapelle qu’une arcade
visible dans la cour du lycée professionnel Condé, envahie par la végétation,
inconnue de la plupart des Bisontins, ainsi que deux pierres tombales
du XIVe siècle sauvées grâce à A. Castan et transférées dans l’église
de la Madeleine où on peut les voir, à condition de se munir d’une lampe
électrique ! Des traces de l’hôpital Saint-Jacques des Arènes disparu | |
Les sept bannières d'après un moule à gaufres du XVe siècle |
L’hôpital était situé dans un quartier appelé « bannière
d’Arènes » au XIIe siècle, lorsque la ville s’est structurée pour
la mise en place des libertés communales obtenues de son seigneur le prince-évêque.
L’étendard de la bannière d’Arènes portait de gueule un lion d’or rampant
flanqué de deux coquilles. On en retrouve le dessin sur un fer à gaufres
du XVe siècle qui porte les armes des sept bannières ou quartiers de Besançon
au Moyen Age. |
Si l’hôpital n’a pas laissé de traces visibles, quelques mentions dans
les archives nous assurent pourtant de sa pérennité au cours des siècles. -
De nombreux legs et donations sont consignées dans les archives hospitalières
tout au long des XVIIe et XVIIIe
siècles . L’hôpital Saint-Jacques de l'époque moderneLorsque les religieuses de sainte Marthe arrivent en 1667, on est tout près d’un changement majeur : Mgr de Grammont va faire don d’un terrain situé de l’autre côté du Doubs pour la construction d’un équipement nouveau, auquel la municipalité va donner son aval le 2 septembre 1671 [21] . Curieusement ce lieu est appelé « Chamars » en souvenir du Champ de Mars gallo-romain, l’hôpital resta ainsi lié au passé romain de la ville… Il y fut transféré en 1686, au cœur de la citée, derrière la deuxième enceinte, loin des portes. | |
cliquer pour agrandir | En 1678 la paix de Nimègue qui entérine l’annexion de la Franche-Comté à la France est signée, et l’hôpital Saint-Jacques devient hôpital général par décision de Louis XIV en 1685. La lettre patente du roi défend « aux mendiants du dehors d’entrer dans la ville » et aux bisontins de leur faire l’aumône. C’en est fini de l’obligation d’accueil qui prévalait depuis des siècles ! On pense avec cette mesure à l’édit que Louis XIV avait
signé à Fontainebleau en août 1671 pour la répression des
abus qui se commettent en pélerinage : arguant du maintien
de la morale publique, il avait mis au point une réglementation obligeant
les pélerins à se munir avant leur départ d’un certificat délivré par
l’autorité civile, sur attestation produite par leur évêque, et qu’ils
devaient présenter aux gardiens de l’ordre au cours de leur déplacement.
Dans la capitale de la Franche-Comté nouvellement conquise il fait mieux
, ceux dont Lucius III au XII° siècle avait approuvé qu’on les reçoive
avec les secours de la charité sont maintenant interdits dans la
ville ! Gilberte Genevois, sept. 2003 |
AnnexeLucius papae III, permittit canonicis ste Magdalenes, ut domum hospitalem praescitim ad peregrinos excpicudos, infra parochiam suam construant annos Christi (ut videtur) 1182/ quam ipsis in vico Arenarum Sti Jacobi Ecclésiae apposuerunt. Lucius Episcopus Servus Sevorum Dei dilectis filiis canonicis Sancte Mariae Magdalena de Bisuntio, salutem et apostolicum benedictionem. Cum ecclesia nostra magnam, sient accepimus,in publicâ stratâ parochiam habeat, nec in ea ad quod transcuntes divertere valeant hospitale, domuù quandam ad receptionem transcuntium facere decrevistis, ut in ea lii qui Romam veniunt aut ad Jerosolymitanas partes accedunt grata subsidia recipiant caritatis . Unde quia super hoc auctoritatem nostram requiritis et assensum nos vobis tanto libentius sient debenus annuimus quanto propositum vestArum ut pote pium satis et commendabilem sollicitus convenit promoveri. Vestri itaque postulationibus annuentes, prescutibus vobis litteris indulgenus, ut infra parrochiam, in proprio fundo ecclésia vestre hospitale domum, sicut dictum est construendi nullius contradictione vel appellation obstante, habeatis de auctoritate nostra liberam facultatem. Datum Vilettrae XIII Kal Junii Lucius Papae IIILe pape Lucius III permet aux chanoines de Sainte-Madeleine de
construire une maison hospitalière destinée à recevoir les pèlerins, sous
la résidence, semble-t-il, en l'année 1182, qu'ils ont adjointe à l'église
Saint-Jacques du bourg d'Arènes. Donné à Villetra le 13 des calendes de Juin. (le 17 mai ?)
Sources :
Bibliographie : Mémoires et documents inédits pour servir à l’histoire de la Franche-Comté de l’Académie des Sciences Arts et Belles-Lettres de Besançon Tome 7, Besançon 1876. Castan, Auguste Annuaires du Doubs, notices sur l’hôpital du Saint Esprit années 1864,1865 et sur les arènes de Besançon année 1885 Castan, Auguste, Besançon et ses environs, Besançon 1936, rééditions Laffitte reprints 1977, Marseille Castan ,Auguste, Extraits des registres de délibérations municipales, Besançon 1898. Coindre, Gaston, Mon Vieux Besançon, Besançon 1900, réédition Cêtre Besançon 1986 Musy (chanoine), « L’hopital saint Jacques des arènes », Mémoires de la Socité d’émulation du Doubs, année 1929 Loye L. (abbé), Histoire de l’église de Besançon, Besançon 1901 Rossignot, J. (chanoine) La Madeleine de Besançon, éditions Dossane, Besançon 1902. Fohlen, Claude dir., HistAoire de Besançon, Editions Cêtre Besançon ,1964 tome 1 Fiétier, Roland dir., Histoire de la Franche-Comté, éditions Privat 1977 Locatelli, René, Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Besançon, volume 185, année 1982-1983. Toillon, Eveline, Les rues de Besançon, éditions Cêtre 1989 Brocard ,Nicole , Soins, secours et exclusion, établissements hospitaliers et assistance dans le diocèse de Besançon aux XIV° et XV° siècles, Presses Universitaires de Franche-Comté, 1998 Delsalle, Paul, La Franche-Comté au temps de Charles Quint, Presses Universitaires de Franche-Comté, 2000 Péricard-Méa, Denise, Compostelle et culte de saint Jacques au Moyen Age, PUF Paris 2000 Gicquel, Bernard, La légende de Compostelle, éditions Tallandier 2003 [1] Loye, L., Histoire de l’église de Besançon, t. IV,p. 46. [2] voir texte de la Bulle de Lucius III en annexe. [3] Coindre, G., Mon Vieux Besançon , tome 1, p. 315. [4] Loye, L. , Histoire de l’église de Besançon, tome IV, p. 304 [5] Cartulaire de Sainte-Madeleine, Archives départementales du Doubs, G 1261 [6] Castan, A., Annuaire du Doubs 1885 p. 132 [7] Gicquel, B., La légende de Compostelle, partie I, p. 48-49 [8] Loye, L.,
Histoire de l’église de Besançon, t. I, p. 24 [9] ADD, G 1261. [10] ADD, G 1261 [11] Chifflet, J. J., Vesontio (Histoire de Besançon), 2° partie, p. 281 de l’édition originale [12] Manuscrits et documents inédits, de l’Académie des Arts, Sciences et Belles Lettres de Besançon, t. 7 – 1876 [13] ADD, G 1261 [14] Castan, A., « note sur L’hôpital du Saint-Esprit », Annuaire du Doubs, 1864, p. 166 [15] Nicole Brocard cite ces chiffres dans Soins, secours et exclusion, source : ADD fonds Hospices civils de Besançon 53 J III [16] Castan, A., de sa note dans l’Annuaire du ADoubs de 1864, p. 169. [17] Note sur l’histoire municipale, délibérations municipales, registre n° 42, p. 91. [18] A. Castan, Besançon et ses environs, p.186. [19] Toillon, Evelyne, Le nom des rues de Besançon (citées par ordre alphabétiques) [20] G.Coindre en donne un dessin dans Mon Vieux Besançon . Elle est visible dans une chapelle attenante à l’église où elle est depuis des années en attente de restauration. [21] Les actes concernant la construction du nouvel hôpital, le transfert, la vente du vieil immeuble sont aux ADD Archives des hospices publics de Besançon |
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