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Accueil mise à jour le 9 septembre, 2005 Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. survol du site Page précédente
 

Saint Jacques à Gaillac

A Gaillac, ville où commençait la navigation sur le Tarn, une association fait revivre une tradition ancienne d'une fête qui semble héritée du culte à saint Jacques patron des mariniers et des marchands. Elle incite à une nouvelle lecture des travaux de Bertrand de Viviés, conservateur du musée de Gaillac.


Sur cette carte postale d'avant 1914, le quai Saint-Jacques et l'ancien hôpital Saint-Jacques,

dit aussi Saint-Jacques de Clarieux, (du nom d'un ruisseau descendant du chateau de l'Orme à l'extrémité gauche de cette vue, le long de la rue de la Navigation).
Au XVe siècle, la ville possédait également une porte Saint-Jacques qui ouvrait peut-être sur ce faubourg.

La mémoire des habitants du quartier Quai Saint-Jacques



       

En 2003, les habitants du quartier Quai Saint-Jacques se sont indignés de voir que leur ancien "quai Saint-Jacques" avait été débaptisé par le Conseil Municipal en "rue du quai". Les jeunes, eux, avaient perdu jusqu'au souvenir de la fête du quartier qui avait jadis lieu le dernier dimanche de juillet. Les anciens ont alors créé une association avec pour objectifs :
• de reprendre l'organisation de fêtes, préfigurant cette reprise, un repas de quartier a été organisé le 26 juillet 2003
• de rassembler tous les documents relatifs aux fêtes passées
• de marquer à nouveau l'emplacement de l'ancien hôpital Saint-Jacques.
Pour aucun d'entre eux la référence à Compostelle, figurant sur un panneau à l'entrée de la ville n'a de signification en relation avec l'histoire de leur quartier. Certes ils ont conservé la mémoire du même saint Jacques. Mais il s'agit du patron des mariniers et des marchands dont ils habitent les anciennes maisons. Leurs traditions n'ont rien à voir avec le pèlerinage à Compostelle. Ils fêtent saint Jacques chez eux, au bord des eaux dont il les protégeait sur ce quai où était l'hôpital qui portait son nom, dont le souvenir était gravé sur une pierre aujourd'hui disparue.

La première mention de cet hôpital date de 1220. Il a été écrit que son acte de fondation mentionne sa vocation au service des pèlerins, mais à cette époque les lieux de pèlerinage étaient nombreux et cette mention reste à revérifier. D'autres archives ont malheureusement brûlé en 1562. Ensuite un seul pèlerin est attesté, venant de Carcassonne, sans mention de sa destination. Uni à l'hôpital Saint-André en 1695, on en retrouve ensuite la trace au XIXe comme entrepôt de charbon puis de bois. A son emplacement sont aujourd'hui des maisons d'habitation, la plus haute occupant l'emplacement de la chapelle.

 

 

Légendes des photos :

en haut cadastre du XIXe siècle montrant le quartier Saint-Jacques et la plaque de la rue du quai camouflée par les habitants

ci contre, le quai Saint-Jacques, vers 1915, vers 1995, aujourd'hui

La mémoire historique


Podium de la fête de 1947

En différents lieux, dès le Moyen Age, saint Jacques est invoqué contre les dangers des eaux, liés à la navigation ou aux inondations. Les pouvoirs qui lui étaient attribués remontaient sans doute à l'époque où les saints ont succédé aux dieux. Un exemple en est donné, au XIIe siècle, par un miracle de saint Jacques où l'on voit un naufragé l'interroger alors qu'il surgit du fond de la mer : "Es-tu le Dieu de la mer " ? Et saint Jacques lui répond : "Je suis le serviteur du Dieu de la mer". A Gaillac, saint Jacques protégeait des eaux du Tarn. D'autres exemples de ce pouvoir se retrouvent ailleurs, à Echirolles où les édiles de Grenoble venaient en procession implorer sa protection contre les crues du Drac, à Orléans où la "communaué des marchands naviguant sur la Loire et ses affluents" se place sous son patronage, avec des chapelles, des croix, des hôpitaux tout au long du fleuve.
Gaillac et sans doute le bassin de la Garonne ont fait de même. Toute une population de mariniers, de marchands, de riverains, de transporteurs de pastel, de vin, de bois, de charbon vivait du fleuve, Gaillac étant tête de pont de la navigation sur le Tarn. C'est elle qui fêtait son protecteur le 25 juillet. Le souvenir de la fête renait. En retrouver le sens premier contribuerait à l'enrichir.

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A Gaillac, les fêtes du quartier Saint-Jacques ont repris dès 1945 et se sont éteintes en 1954. Ces illustrations datent de 1947. Chaque année des embarcations décorées défilaient sur le Tarn, ultimes souvenirs de bénédictions anciennes. Sur l'autre rive du Tarn, à Brens, l'actuelle église Saint-Eugène a porté, jusqu'à la Révolution, le vocable Saint-Jacques renforçant la protection du saint sur ce point de départ d'une navigation souvent périlleuse. Ces souvenirs jacquaires locaux ont ensuite été balayés par la "tornade" compostellane qui pendant trois décennies a voulu que tout souvenir jacquaire soit lié au sanctuaire galicien. L'Association du quartier Quai Saint-Jacques a pour objectif de les faire revivre.

Bertrand de Viviés signale la référence suivante, tirée du livre de Daniel Loddo, 100 ans de vie musicaleà Gaillac (La Talvera, 1987, p. 109) :

"naguère chaque quartier de la ville possédait sa vota c'est à dire sa fête votive dédiée à un saint. Elles s'échelonnaient de juin à octobre : saint Jean, saint Pierre, saint Henri, Marie-Madeleine... saint Jacques sans doude l'une des plus anciennes de la ville avait lieu fin juillet, quartier de la gorga, l'actuel quai. Lorsque les bateaux naviguaient sur le Tarn, les matelots ne manquaient jamais de faire halte au moment de la fête et joignaient leurs danses à celles de la population du quartier composée principalement de pécheurs, mariniers, filatiers et minotiers ..."

En 1996, lorsque tous les regards se tournaient encore vers Compostelle, Bertrand de Viviés a commencé un important travail de recherche sur le patrimoine jacquaire du Tarn, publié sous le titre Les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en Albigeois et en Haut-Languedoc. C'est ainsi qu'il signale, à Gaillac, une relique de saint Jacques, un os conservé encore en 1847 en l'église Saint-Pierre. Ne provient-elle pas de la chapelle de l'hôpital Saint-Jacques, pillée en 1562 ? N'était-elle pas sortie en procession le jour du pèlerinage local, fête par excellence ? De cet hôpital, Gaillac conserve la pierre d'entrée gravée en 1615 (conservée au musée) ainsi que, vraisemblablement, le panneau d'un coffre du XVIe siècle sculpté d'un saint Jacques pèlerin (actuellement devant d'autel en l'église Saint-Michel).

Enfin, il ne semble pas que soit le fruit du hasard la présence très ancienne de saint Jacques sur la rive gauche du Tarn : dès 972 il est le patron de l'église de Brens.

 

Faire mémoire aujourd'hui

Cette histoire intéressera les pèlerins de Compostelle s'il en passe par Gaillac. Ils y sont invités par la publicité faite autour des modernes chemins de pèlerinage consacrés Itinéraire Culturel Européen. Au delà de l'ambition politique qui leur a valu cette consécration, ces chemins répondent à un besoin de notre époque, et beaucoup de nos contemporains y découvrent des occasions d'enrichissement intellectuel ou spirituel. Les rencontres des autres pèlerins sont souvent présentées comme une des richesses du chemin. Tout aussi passionnante sera la découverte de tous ceux qui vont revivre des traditions locales si leur existence est prise en compte et valorisée. C'est en effet dans ces traditions que se trouvent les vraies racines communes aux pays de l'Europe tout autant que dans la fréquentation de chemins orientés vers le sanctuaire galicien.

Informations recueillies auprès de Serge Toinote et Yves Sirven,

reproductions photographiques noir et blanc de S. Toinote
Association du quartier Quai Saint-Jacques,
30 rue du quai Saint-Jacques, Gaillac, Tarn visiter le site de l'association

& Bertrand de Viviés, conservateur du musée de Gaillac.

Trois photos couleur sont extraites de son livre.

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