Accueil | mise à jour le 15 janvier, 2009 | Connaître saint Jacques. Comprendre Compostelle. | survol du site | Page précédente |
L'auteur est prêtre il nous a confié cette présentation de l'épître de Jacques. Aujourd'hui les spécialistes sont certains qu'elle n'a pas été écrite par Jacques le Majeur, celui que les pèlerins vénèrent à Compostelle. Mais quand le pèlerinage est né et encore longtemps après, ses fidèles la lui attribuaient. Aujourd'hui elle nous semble toujours d'actualité dans son humanité qui rejoint sans doute beaucoup de pèlerins dans leurs recherches.
Ecrite en 56, l’épître de Jacques ne peut être attribuée à Jacques frère de Jean qui avait été décapité en 43 sur l’ordre d’Hérode Agrippa, mort au printemps 44 (Actes des Apôtres 12, 1-2). Elle émane de celui que Paul appelle « Jacques, le frère du Seigneur » (Ga 1,19). Cet homme est nommé deux fois dans les Evangiles de Marc et Matthieu (Mc 6,3 et 15, 40 ; Mt 13,55 et 27,56) ; sa mère s’appelait Marie et avait très probablement pour époux un certain Clopas (Jn 19,25) que la tradition identifie comme un frère de Joseph. Jacques, (appelé « le petit » en Mc 15,40) était donc un cousin germain de Jésus. Dans le langage de l’époque en Palestine, « frère » désignait une parenté large, comme aujourd’hui en Afrique ou au Liban. Ce Jacques, cousin de Jésus, a été choisi comme évêque de Jérusalem après la dispersion des apôtres (Actes 12,17 ; 15,13 ; 21,18). Il est mort en 62, lapidé sur l’ordre du grand-prêtre Anan. L’épître de Jacques est rédigée
entre la première épître de Paul aux Corinthiens
(printemps 56) et l’épître aux Galates (hiver 56-57),
Jacques ayant eu connaissance de l’épître aux Corinthiens.
Quand Paul la reçoit, à la fin de l’été 56,
il s’étonne que Jacques empiète sur ses responsabilités
d’Apôtre des païens, mais il tient à souligner
que Jacques a approuvé ses méthodes d’apostolat
(Ga 2, 9-10). D’ailleurs, Jacques a voulu aider Paul dans le
redressement des communautés que celui-ci avait fondées
dans la « dispersion », c'est-à-dire dans le monde
païen et il avait pris soin de préciser que la loi chrétienne
est une « loi de liberté » (Jc 1, 25 et 2, 12 ;
cf Ga 2,4). Jacques explique ce qu’est la véritable sagesse (Jc
1, 5-8 et 3, 13-18 ; voir 1Co 1, 17 ss) : Il met en garde contre le mépris des pauvres dans l’assemblée
chrétienne (Jc 2, 1-13 ; cf 1Co 11,22) : Il exhorte à exprimer sa foi par les œuvres de l’amour (Jc 2, 14-26 ; cf 1Co 13,2) : Il dénonce les méfaits d’une langue mal maîtrisée (Jc 3, 5-12 ; cf 1Co 13,1) : Il condamne ceux qui scandalisent leurs frères en mangeant
des aliments interdits par la loi (Jc 4, 11-12 ; cf 1Co 10, 23-33)
: Il s’en prend sévèrement au matérialisme
pratique (Jc 4, 13-17 ; cf 1Co 15,32) : L’épître de Jacques s’inspire de nombreuses
paroles de Jésus transmises par la tradition orale avant d’être
mises par écrit dans les évangiles actuels. Un exemple
caractéristique est « Heureux les pauvres car le Royaume
de Dieu est à eux » (Mt 3 ; Lc 6,20). Jacques reproduit
cette béatitude en la complétant à l’aide
de 1Co 1, 27-28 : « Dieu n’a-t-il pas choisi les pauvres
selon le monde pour les rendre riches dans la foi et héritiers
du Royaume … » (Jc 2,5). Un point difficile de la lettre est la discussion sur la foi et les œuvres (Jc 2,14-26) où Jacques semble contredire Paul (Romains 4, 1-25). En fait, la contradiction n’est qu’apparente. En 1Co 13,2, Paul avait écrit : « Quand j’aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter les montagnes, si je n’ai pas la charité, je ne suis rien ». Jacques ne dit rien d’autre en écrivant : « A quoi sert-il, mes frères, que quelqu’un dise « J’ai la foi », s’il n’a pas les œuvres ? » (Jc 2,14). De toute évidence, Jacques n’emploie pas le mot « œuvres » au sens de pratique de multiples préceptes de la Loi mais au sens des œuvres de l’amour : nourrir et vêtir les malheureux. Mais Paul n’aime pas le mot « œuvre » parce qu’il évoque la pratique intégrale de la Loi. Puisque les païens ne connaissent pas la Loi, ils ne pourraient jamais être justifiés s’ils devaient l’être par les œuvres de la Loi. Ils sont réconciliés avec Dieu par la foi au Christ mais cette foi les engage sur la voie de l’amour (Rm 5,5) et les conduit à se faire « esclaves de la justice » (Rm 6,18). C’est bien à une œuvre de l’amour que Jacques se réfère quand il dit qu’Abraham fut justifié en offrant Isaac, son fils, sur l’autel (Jc 2,21). Il ne s’agit pas là d’une œuvre commandée par la Loi mais d’une œuvre commandée par l’amour. En interprétant en ce sens Gen 15,6, (« Abraham crut en Dieu et cela lui fut compté comme justice »), Jacques ne fait que se conformer à la tradition juive qui unissait indissolublement la foi d’Abraham et l’offrande d’Isaac : « Abraham n’a-t-il pas été trouvé fidèle dans l’épreuve (Gen 22,1) et cela ne lui a-t-il pas été compté comme justice ? » (1 Maccabées, 2,52). Mais Paul va distinguer soigneusement, conformément à la lettre de l’Ecriture, la justification initiale d’Abraham où seule la foi intervient (Ga 3, 6-7 ; Rm 4 1,25), qui est le prototype de celle des croyants chrétiens et la vie dans l’Esprit qui est une vie dans l’amour. Paul dira dans l’épître aux Ephésiens : « Nous avons été créés dans le Christ Jésus en vue des bonnes œuvres que Dieu a préparées d’avance pour que nous les pratiquions » (Eph 2,10). L’épître de Jacques est célèbre pour l’amour des pauvres qui s’y exprime et la vigoureuse dénonciation de l’insolence des riches qu’on lit en Jc 5, 1-6. Par ailleurs, elle est précieuse dans son attestation, en l’an 56, de la pratique du sacrement des malades (Jc 5, 14-15). Dans le même passage, Jacques parle des ministres de l’Eglise qu’il appelle les « presbytes » (les « anciens ») qui agissent « au nom du Seigneur ». Les destinataires de la lettre, les communautés d’obédience paulinienne, étaient donc dirigées par des ministres, que Paul appelait habituellement des « épiscopes » (voir Philippiens 1,1) mais qu’on appelait « presbytes » à Jérusalem (Ac 11,30 ; 15,6 ; 21,18). Peu de temps après avoir reçu l’épître de Jacques (fin de l’été 56), Paul donnera à son collaborateur Tite (au printemps de 58) des consignes précises pour le choix des presbytres – épiscopes – « Si je t’ai laissé en Crète, c’est pour y achever l’organisation et pour établir dans chaque ville des presbytes, selon mes instructions. Chaque candidat doit être irréprochable, mari d’une seule femme (= époux fidèle) avoir des enfants croyants qui ne puissent être accusés d’inconduite et ne soient pas insoumis. L’épiscope, en effet, en sa qualité d’intendant de Dieu, doit être irréprochable : ni arrogant, ni coléreux, ni buveur, ni batailleur, ni avide de gains déshonnêtes, mais au contraire hospitalier, ami du bien, pondéré, juste, pieux, maître de soi, attaché à l’enseignement sûr, conforme à la doctrine » (Tite 1, 5-9). On voit combien il est important de confronter l’épître de Jacques avec les lettres de Paul qui lui sont contemporaines : les « colonnes de l’Eglise » ne dialoguaient pas entre elles seulement par la parole (Gal 2,9) mais également par écrit. Philippe Rolland, prêtre Les citations sont extraites de la Bible des Peuples dans sa version
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